Dans un billet paru sur le blogue du Stupidarium et s’intitulant Pédo or not pédo, Mike « Un genre de Steven Seagal contre les pédos » Tremblay dénonce le regard posé par des pères de familles sur des monitrices de patin, âgées de 12 à 15 ans, qui donnent des cours de patinage artistique à des fillettes. Certes, le fait que ce billet m’ait interpellé n’est sans doute pas étranger au fait que j’écris présentement une thèse doctorale sur l’hypersexualisation des jeunes filles au cinéma, mais bon… Je tiens à partager une courte réflexion faisant suite à la lecture dudit billet
Dans son billet, M. Tremblay s’indigne (avec raison) des commentaires lancés par un père qui avoue avoir passé la séance à « zyeuter » les jeunes monitrices dont il pourrait très bien être le père. L’individu en question justifie son regard en disant que les jeunes filles n’ont « qu’à porter des affaires moins serrées », une affirmation plutôt idiote dans le contexte d’un cours de patin – je me demande comment ce père justifierait son regard si le cours en question en était un de natation…
Vers la fin de son billet, M. Tremblay pose LA question qui sous-tend une bonne part de mes recherches: « Est-ce que c’est réellement de la pédophilie ou bien ce n’est qu’une déviance inconsciente? » En considérant les images sexualisantes qui posent en objet de contemplation (et de désir) des jeunes filles à peine pubères, et considérant les images de femmes adultes infantilisées qui pullulent dans nos médias, notre culture procède à un dangereux positionnement de la jeunesse en tant qu’érotique. En guise de réponse, j’avancerais donc qu’il s’agit À LA FOIS de pédophilie et d’une déviance inconsciente (et répandue).
Mais alors quelle est la solution? Comment éviter le dangereux glissement qui s’opère, et qui est catalysé par les représentations fort troublantes d’une jeunesse hypersexualisée (que les penseurs anglo-saxon nomment le ‘phénomène lolita’)? Dans un article qui étudie la représentation de la jeune fille sexualisée dans des publicités de mode, Debra Merskin propose une littératie médiatique accrue pour contrer ce phénomène, et personnellement je crois qu’elle a entièrement raison! Cette littératie face à l’image hypersexualisée pourrait venir révéler l’influence qu’ont les images médiatiques sur le désir et, surtout, sur l’idéalisation d’un objet de désir.
Finalement, cette littératie médiatique face aux images culturelles sexualisantes (et souvent pornographisantes) peut notamment se développer par l’enseignement des réflexions féministes sur l’image, le regard et le désir. Après tout, lorsqu’on me demande ce qui fait que j’adhère aux visées féministes en tant qu’homme, j’ai tendance à répondre que je n’aime pas me faire imposer des images génératrices d’un désir qui n’est pas le mien…
N’hésitez surtout pas à commenter ce billet (ou celui du Mike Tremblay)!
Savez-vous la différence entre un DEC et un BAC? Maintenant, oui…vous le savez! lol Bravo pour ce texte, je le soulignerai et (avec ta permission, bien sûr) j’en citerai des extraits ce soir lors de Stupidarium TV.
Merci!
Avec plaisir, M. Tremblay. Merci pour le commentaire!
Je crois plutôt que le comportement de l’homme en question relève entièrement de la pédophilie, tout simplement parce qu’il passe TOUTE la scéance à « zyeuter ». Je ne sais pas combien de temps ce genre de scéance dure, mais sûrement assez pour qu’il puisse prendre conscience de ses agissements.
D’un autre côté, il est vrai que l’hypersexualisation des jeunes filles semble devenir un phénomène considéré banal par la société. Quand je vois Hannah Montana en « p’tit suit » de cuir sur scène, je me demande pourquoi les gens ne réalisent pas à quel point celle-ci a de l’influence sur ces adoratrices, la plupart pré-adolescente, qui voudraient tout faire pour lui ressembler.
Merci pour ce commentaire fort intéressant et très bien exprimé, docmailloux.
Je suis entièrement d’accord pour dire qu’il s’agit d’une forme de pédophilie, et l’homme en question est définitivement conscient qu’il a passé la séance (probablement d’une durée d’une heure) à ‘zyeuter’ les jeunes monitrices, puisqu’il l’admet de son propre chef.
Par contre, crois-tu que cet homme soit conscient de la nature inappropriée de son regard? Après tout, l’exemple (fort pertinent) que tu donnes avec Hannah Montana ne constitue pas juste un modèle identificatoire pour les jeunes filles; notre culture banalise cette hypersexualisation et cette érotisation de la jeunesse, et semble encourager le regard d’hommes adultes à se poser sur des jeunes filles posées comme des « daddy’s girls ». C’est ici que je crois, personnellement, que la déviance en question est plutôt inconsciente. Après tout, si l’homme était consciemment pédophile, n’aurait-il pas eu tendance se taire plutôt que se vanter d’avoir ‘zyeuté’ la jeune monitrice pendant toute la séance?
Finalement, je suis très content de ton commentaire puisqu’il a fait avancer la réflexion. N’hésites surtout pas rappliquer…
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